Ils ont plus de 60 ans et ils sont en pleine forme.En fait, ils sont en meilleure forme physique que l'ensemble de la population. Toutes catégories d'âge confondues. La retraite, d'accord, mais pas en pantoufles. Ils la passent plutôt sur la route ou à la piscine, en prévision d'un marathon ou d'un Ironman.Mais comment font ces sportifs pour réussir ces défis que des personnes de 30 ans, en forme, jugent parfois inaccessibles ? Le plaisir, un emploi du temps moins rempli et la sagesse semblent être le secret de leurs performances.
Rosaire Gagné, 66 ans, qui a atteint le cap des 100 marathons lors de celui de Montréal, en septembre dernier, éprouve toujours le même plaisir quand il court. «J'aime la sensation de me sentir en forme», déclare-t-il au bout du fil, pressé de filer prendre un avion qui devait l'emmener en Caroline du Sud en compagnie de son ami Pierre Bourassa, 63 ans. Des vacances? Si on veut. En fait, il s'agit plutôt de participer à un marathon. Quoi d'autre? «On court le marathon de Myrtle Beach en préparation à celui de La Nouvelle-Orléans... la semaine suivante.»
Victors Demers, 64 ans, est devenu actif tard. À 40 ans, il a appris à nager. À 50, il a commencé à courir. Aujourd'hui, il participe à des Ironman. Il nage donc 3,8 km, roule ensuite 180 km en vélo et finit le tout par un marathon (42,2 km). Une épreuve qu'il franchit en moins de 13 heures. Il voit dans son statut de retraité un avantage. «À mon âge, on n'a plus de responsabilités familiales. C'est plus facile de pouvoir s'entraîner 14 à 15 heures par semaine (durant la période la plus intense de la préparation)», avance celui qui se considère «un peu paresseux».
Michel Gagné, directeur des relations publiques et du financement du Triathlon de Lévis et lui-même athlète d'endurance (il a 14 marathons, six Ironman et un double Ironman à son actif), croit quant à lui que les athlètes plus âgés bénéficient d'un atout important : la sagesse. «Ils se connaissent bien et sont à même de bien gérer l'intensité de leur entraînement. Ils reconnaissent aussi les signaux que leur corps envoie et sont ainsi capables d'éviter les blessures. Au contraire, les jeunes veulent souvent tout, tout de suite et s'entraînent trop, trop rapidement», explique-t-il en mentionnant l'exemple d'un jeune membre de son club qui, dès la première année, voulait participer à un marathon et à un Ironman. Résultat, les blessures l'ont laissé sur la touche à de nombreuses reprises, raconte l'athlète de 50 ans, qui se prépare par ailleurs à participer à un double Ironman.D'autre part, explique-t-il, les personnes plus âgées qui font de longues distances ont tendance à délaisser les entraînements à haute intensité et à se concentrer sur l'endurance. Le corps est donc soumis à un stress moins important.Ainsi, même si les blessures l'ont épargné, M. Gagné a changé ses habitudes pour pouvoir continuer à courir. «On a toujours l'impression d'être jeune. Mais il faut quand même changer sa routine. Il faut mieux gérer ses efforts.» Alors qu'il courait auparavant une centaine de kilomètres par semaine, il a diminué sa moyenne hebdomadaire à environ 70. «Je cours tous les jours une dizaine de kilomètres. Je fais aussi mes courses de façon plus modérée», avance celui qui a l'intention de participer à des épreuves de 100 km et de faire le tour du lac Saint-Jean à la course en cinq jours.
Mais pourquoi s'astreindre à un tel régime physique ? «Pour la fraternité et le climat amical qui règne entre les sportifs, avance M. Demers. Je le fais aussi pour entretenir mon corps et pour profiter de l'énergie que génère chaque entraînement.»Son dévouement a un autre effet positif. «Ça motive mes enfants, qui trouvent parfois qu'ils n'en font pas assez!» Il concède toutefois qu'il n'est pas indispensable de maintenir une telle cadence pour améliorer sa qualité de vie.Au sommet, à tout âgeAvec l'âge vient l'inexorable déclin des performances.
«À partir de la trentaine, un coureur voit ses performances diminuer de 1 % chaque année», rappelle Jean-Yves Cloutier, entraîneur au Club des vainqueurs. Comment alors garder sa motivation, si on était avant un coureur d'élite ou, plus simplement, débuter quand on a dépassé la soixantaine ? Il suffit d'adapter ses objectifs.«Plutôt que de viser le premier rang toutes catégories confondues, les coureurs compétitifs peuvent viser la première place de leur groupe d'âge.» De cette façon, ils peuvent ainsi se comparer à des athlètes de leur calibre. Les novices, eux, doivent s'armer de patience. «Un jeune de 25 ans et en bonne condition physique peut envisager de participer à un marathon au bout de six mois. Une personne de 60 ans mettra plutôt deux ans à atteindre cet objectif», prévient l'entraîneur.Attention toutefois, prévient Julie Desautels, physiothérapeute chez Kinatex Centre-ville. «Comme tout le monde, ces sportifs doivent être à l'écoute de leur corps. Tant qu'il n'y a pas de douleurs, tant que le corps ne dit pas d'arrêter, il n'y a pas de problème. Par contre, dès qu'une douleur apparaît, il ne faut pas hésiter à consulter un spécialiste.» Elle insiste également sur la nécessité de passer un bilan médical avant de commencer l'entraînement et d'en faire annuellement par la suite.
Par ailleurs, comme les talons perdent avec l'âge une partie de leur capacité d'absorption, elle conseille aux coureurs de se doter de souliers de qualité et d'éviter les surfaces dures. Surtout, elle rappelle que l'activité physique permet de retarder le ralentissement du métabolisme. La fontaine de jouvence est moins loin qu'on ne le croit !